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VOCATION DES CARMÉLITES
Nombreuses sont les Franç aises qui entrent en religion. Et le dé vouement que certaines (l'entre elles, les Petites Sœ urs des Pauvres notamment, apportent à soigner les malades, les orphelins, les infirmes, les vieillards, force l'admira- tion gé né rale.
De toutes les religieuses, il en est peu qui obé issent à une yè gle aussi sé vè re que les Carmé lites. Mais c'est de cette rigueur mê me qu'elles tirent l'essentiel de leur courage. Il revenait au gé nie brû lant de GEORGES BERNANOS d'exalter cette hé roï que vertu, ainsi qu'on le verra dans la scè ne où l'é crivain met en pré sence la Prieure du Carmel de Compiè gne et la jeune Blanche de la Force, qui, en pleine pé riode ré volutionnaire, sollicite son admission dans la sainte maison.
LA PRIEURE1. — Qui vous pousse au Carmel?
BLANCHE. — Votre Ré vé rence m'ordonne-t-elle de parler tout à fait franchement?
LA PRIEURE. — Oui.
BLANCHE. — Hé bien, l'attrait d'une vie hé roï que.
LA PRIEURE. — L'attrait d'une vie hé roï que, ou celui d'une certaine maniè re de vivre qui vous paraî t — bien à tort — devoir rendre l'hé roï sme plus facile, le mettre pour ainsi dire à la porté e de la main?..
BLANCHE. — Ma Ré vé rende Mè re, pardonnez-moi, je n'ai jamais fait de tels calculs.
LA PRIEURE. — Les plus dangereux de nos calculs sont ceux que nous appelons des illusions...
BLANCHE. — Je puis avoir des illusions. Je ne demanderais pas mieux qu'on m'en dé pouille.
LA PRIEURE. — Qu'on vous en dé pouille... (Elle appuie sur les trois mots.) Il faudra vous charger seule de ce soin, ma fille. Chacune ici a dé jà trop à faire de ses propres illusions. N'allez pas vous imaginer que le premier devoir de notre é tat soit de nous venir en aide les unes aux autres, afin de nous rendre plus agré ables au divin Maî tre, comme ces jeunes personnes qui é changent leur poudre et leur rouge avant de paraî tre pour le bal. Notre affaire est de prier, comme l'affaire d'une lampe est d'é clairer. Il ne viendrait à l'esprit de personne d'allumer une lampe pour en é clairer une autre. «Chacun pour soi», telle est la loi du monde, et la nô tre lui ressemble un peu: «Chacun pour Dieu!» Pauvre petite! Vous avez rê vé de cette maison comme un enfant craintif, que viennent de mettre au lit les servantes, rê ve dans sa chambre obscure à la salle commune, à sa lumiè re, à sa chaleur. Vous ne savez rien de la solitude où une vé ritable religieuse est exposé e à vivre et à mourir. Car on compte un certain nombre de vraies religieuses, mais bien davantage de mé diocres et d'insipides. Allez, allez! ici comme ailleurs le mal reste le mal, et pour ê tre faite d'innocents laitages, une crè me corrompue ne doit pas moins soulever le cœ ur qu'une viande avancé e... Oh! mon enfant, il n'est pas selon l'esprit du Carmel de s'attendrir, mais je suis vieille et malade, me voilà trè s prè s de ma fin, je puis bien m'attendrir sur vous... De grandes é preuves vous attendent, ma fille*...
BLANCHE. — Qu'importé, si Dieu donne la force! (Silence.)
LA PRIEURE. — Ce qu'il veut é prouver en vous, n'est pas votre force, mais votre faiblesse...
(Silence.)
... Les scandales que donne le monde ont ceci de bon qu'ils ré voltent les â mes comme la vô tre. Ceux que vous trouverez ici vous dé cevront. A tout prendre, ma fille, l'é tat d'une religieuse mé diocre me paraî t plus dé plorable que celui d'un brigand. Le brigand peut se convertir, et ce sera pour lui comme une seconde naissance. La religieuse mé diocre, elle, n'a plus a naî tre, elle est né e, elle a manqué sa naissance, et, sauf un miracle, elle restera toujours un avorton2.
GEORGES BERNANOS. Dialogues des Carmé lites, 2e tableau, scè ne 1 (1949).
Примечания:
1. Приоресса, настоятельница монастыря. 2. Недоноском, т.е. слабым, болезнен ным ребенком.
Вопросы:
* Dans cette tirade de la prieure, appré ciez la justesse, la force des images et des comparaisons.
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